Précautions médicales et chirurgicales

I. Risques de saignements.

1) Prévenir le chirurgien, le dentiste, l’obstétricien et l’ORL (amygdalectomie, chirurgie cervico-faciale) du risque hémorragique lié au Syndrome d’Ehlers-Danlos, à cause de la fragilité des tissus conjonctifs, des vaisseaux sanguins et de la perturbation de l’adhésion/agrégation des plaquettes sanguines.

2) Eviter les endoscopies digestives (surtout les coloscopies, à remplacer si possible par le coloscanner ou la coloscopie virtuelle) et bronchiques, sauf en cas d’absolue nécessité. Il faut alors les réaliser avec une grande prudence et prévenir les saignements éventuels par l’acide tranexamique (Exacyl, 3x1000mg/jour: depuis J-1 au soir, jusqu’à J+1 au soir) et la vitamine C (3×1000 mg, depuis J-7 jusqu’à J+2).

3) L’usage des anti-inflammatoires non stéroïdiens doit être restreint et nécessite impérativement une protection gastrique (inhibiteurs de la pompe à protons).

4) Les anticoagulants et les antiagrégants plaquettaires doivent être utilisés seulement en cas de nécessité absolue, à des doses les plus faibles possibles et avec une surveillance très attentive (ecchymoses, méléna, etc.), en évaluant constamment le rapport bénéfice/risque.

5) L’immobilisation rigide après une entorse est inutile et nuisible (aggravation du désordre proprioceptif, fonte musculaire, risque d’algoneurodystrophie, etc.). La reprise d’activité sous contention souple (les adhésifs de contention mis directement sur la peau sont interdits en raison de l’extrême fragilité cutanée) et les antalgiques (locaux, voire par voie générale) sont des traitements qui peuvent éviter l’anticoagulation.

II. Fragilité des tissus.

1) En cas de plaie ou d’intervention chirurgicale au niveau des tissus mous, il faut prendre les précautions qui conviennent : gestes doux, fils non résorbables à retirer tardivement et progressivement (au moins deux fois le temps normal et enlever d’abord un fil sur deux ou sur trois) afin de prévenir le lâchage de suture. Il faut vérifier à plusieurs reprises l’hémostase en fin de chirurgie.

Ces précautions concernent également la chirurgie abdomino-pelvienne (la chirurgie anti-reflux, la chirurgie bariatrique, la chirurgie des hernies abdominales et des éventrations, la chirurgie de l’incontinence et des prolapsus, des cystocèles et rectocèles, la cholécystectomie, la chirurgie gynécologique, etc.).

2) En chirurgie orthopédique (genoux, épaules, hanches, chevilles, coudes, colonne vertébrale, etc.) : éviter les interventions de stabilisation complète (arthrodèse, par exemple).

Le risque d’algoneurodystrophie (CRPS-1) est très élevé dans le Syndrome d’Ehlers-Danlos, une prévention doit être instaurée en cas désordre d’activation des Mastocytes (MCAD, MCAS, MCDs) ou en cas d’antécédent personnel de CRPS-1 : anti-histaminiques, anti-leucotriènes, vitamine C, N-Acétylcystéine, PEA, éventuellement bisphosphonates, etc.

20% des patients EDS font un CRPS-1 au cours de leur vie (S. Daens; P. Chopra).
85% des patients atteints d’un CRPS-1 sont EDS (P. Chopra).


3) En chirurgie osseuse, il faut savoir que les délais de consolidation (fractures, ostéotomie) sont prolongés. Les greffons osseux ont tendance à « fondre », notamment lors de la mise en place de butée antérieure de l’épaule, contrindiquée dans les luxations pluri-directionnelles des épaules qui sont fréquentes dans cette pathologie.

4) Les corticoïdes sont contrindiqués, sauf en cas de nécessité absolue ou en cas de traitement court (2 à 3 jours).

5) Ne jamais manipuler la colonne cervicale au delà de 30°, en raison du risque de lésion des artères irriguant le cerveau ou de luxation grave des vertèbres cervicales. Eviter les manipulations violentes ou répétées (même active), qui peuvent entraîner des douleurs intenses et durables.

6) Il faut proscrire, sauf nécéssité absolue, la ponction lombaire (risque fréquent de brèche méningée). Il en est de même pour les péridurales, les rachianesthésies qui, si elles sont nécessaires, doivent être réalisées avec précautions et suivies rapidement d’un traitement par « blood patch » en cas d’accident.

7) Eviter les ponctions artérielles (dosages des gaz artériels, artériographies) sauf en cas de nécessité absolue.

8) Lors d’une intraveineuse (injection, prélèvement sanguins, perfusion), les veines étant fragiles, elles se rompent fréquemment. Il faut bien comprimer, le bras tendu, le point de ponction après l’acte technique.

9) Il faut faire attention à l’électricité (TENS, examen neurophysiologique, etc.): l’épaisseur de la peau est diminuée et ses propriétés sont modifiées, ce qui augmente sa capacité de conduction, le risque d’accident et les manifestations d’électrostatisme.

III. En cas d’anesthésie loco-régionale ou générale.

Il faut savoir que les anesthésies locales (dentaires, cutanées) sont souvent peu ou pas efficaces: il convient de doubler ou tripler la dose d’anesthésique, voire de recourir à l’anesthésie générale en cas d’échec. Il en est de même pour l’ensemble de la chirurgie sous anesthésie locale ou la rachianesthésie et les péridurales en obstétrique.

En cas d’anesthésie générale: faire très attention, en cas d’intubation endotrachéale, aux lésions potentielles de la colonne cervicales (luxations) et des voies aériennes (déchirures).

Le réveil peut être prématuré lors d’une chirurgie générale; parfois il est même retardé ce qui peut induire une inquiétude des soignants.

Précautions concernant les grossesses et les accouchements.

Prévoir hors contrindications: 

Exacyl 1000mg en ampoules buvables (adulte), 3x/jour depuis la veille au matin jusqu’à 3 à 7 jours après l’intervention (selon le type d’intervention) 

Augmenter la vitamine C à 3 x 1g/jour, depuis deux semaines avant l’intervention (non urgente) jusqu’à une semaine après celle-ci et ensuite reprendre 1g/ jour (augmente l’adhésion plaquettaire, entre autres) 

Utiliser des fils, si possible, non résorbables (cicatrisation ralentie dans le SED) 

Laisser les fils extérieurs ou agrafes deux à trois fois le temps normal et vérifier la cicatrisation. Enlever d’abord un fil ou une agrafe sur deux ou sur trois et mettre des stéristrips si nécessaire. 

Prévoir deux à trois unités de globules rouges concentrés en salle d’opération en cas d’accouchement ou d’intervention potentiellement sanglante. 

Les anesthésies sont inconstantes et variables en durée (métabolisation des drogues altérée?), les péridurales sont le plus souvent partielles ou inefficaces. 

Considérer toute grossesse comme à haut risque (GHR) avec une surveillance accrue.

Vérifier s’il n’y a pas de béance du col utérin et cercler (si nécessaire) vers 12-16 semaines de gestation.

L’incidence des fausses couches est augmentée (environ 27-29%) mais le nombre moyen d’enfant par femme est globalement dans les normes.

Une rupture prématurée des membranes est possible.

Des contractions utérines précoces et inefficaces sont fréquentes et imposent le repos de la patiente.